Nadia, maman de Bryan né en 1998 (comme Roxane, mais six mois plus tard)
Bonsoir à tous!!
Prenez un bon souffle, installez-vous dans un fauteuil confortable et dégustez le récit de ma vie!!
Mon parcours est plutôt un peu bizarre du fait que Bryan est venu au monde accompagné de sa jumelle. Ma grossesse était plutôt très agitée. J’ai cru perdre mes jumeaux à 2 reprises à cause de saignements sans aucune conséquence fort heureusement. J’ai été mise en arrêt pré-natal dès mon 4ème mois de grossesse et une sage-femme venait à la maison me faire des piqûres pour faire mâturer les poumons de mes bébés au cas où ils décidaient à venir plus tôt que prévu. Tout au long de ma grossesse je n’arrêtai pas de répéter au personnel qui me suivait que je ne sentai pas un des BB bouger. Je savais que j’attendai une fille et un garçon et c’était plutôt le garçon qui était très calme. Je me demandai à chaque examen si son coeur battait. J’ai eu droit à toutes les échographies possibles et imaginables et même eu droit à 2 morphologies foetales, aucune anomalie décelée. Mes BB ont tout de même décidé de venir au bout de la 34ème semaine et donc ils étaient prématurés mais leur poids n’a pas nécéssité de couveuse.
J’ai perdu les eaux le soir du 8 décembre et là nous avons couru comme 2 fous à l’hôpital. Pour ma 1ère grossesse je n’ai pas eu ça et donc j’ai un peu paniqué. Finalement, j’ai accouché par césarienne le 8 décembre à 22:00. Lorsqu’on m’a tendu Jade (la jumelle) j’étais contente mais quand on m’a tendu Bryan, ma 1ère reflexion était « Mon Dieu qu’il est beau!! » les pédiatres et le personnel soignant en salle d’accouchement étaient tous heureux de voir que les petits se portaient bien et les pouces levés nous avons achevé l’opération par une ligature des trompes car mon mari et moi avions assez de 3 enfants. L’attente en salle de réveil était très longue et il m’a semblé avoir attendu 10heures alors que ce n’était qu’une péridurale tout ce qu’il y a de plus banal. De retour dans ma chambre, mon mari, ma soeur et d’autres membres de la famille et amis tardaient à venir et j’ai commencé à m’inquiéter, sans pour autant me soucier le moins du monde de la santé de mes BB. Quand mon mari est entré dans la chambre, il était bizarre, s’est excusé d’être fatigué et est parti au bout de 5 minutes, ma soeur pareil, et les autres également. La nuit fût dure en douleur.
A 6:30 du matin j’appelle mon mari et je lui passe un savon de m’avoir abandonné au bout de 5 minutes sans tenir compte de mon besoin de l’avoir à mes côtés. Il était tout triste au bout du fil, je lui est posé la question s’il était déçu qu’ils soient arrivés plus tôt que prévu mais la réponse était non. Alors qu’y a t’il? La réponse m’est tombé dessus comme une foudre. « Il y a un petit problème avec le garçon » mais quoi donc? « Il est un petit peu trisomique »… « mais si tu veux nous ne sommes pas obligé de le garder, il y a des familles d’adoption… » Là j’ai éclaté en larmes!! on ne peut pas être un peu trisomique. On l’est ou on ne l’est pas je lui ai répondu!!! je me suis sentie dépourvue de tout! vide! fragile! coupable! indigne! etc. mais une chose est sûre, je le voulais!! ma première réflexion c’est « je ne pourrais jamais te donner le garçon que tu souhaitais » mais celui-ci il est là et je le garde!!
Pendant 18 jours d’hospitalisation le personnel soignant de l’hôpital de La Tour à Genève était plus que à la hauteur. J’ai eu droit au meilleur traitement possible de la part des infirmières, la chef et toute l’équipe médicale. Famille et amis m’ont également soutenu!! mes beaux-parents (je n’ai plus mes parents) habitant en Bretagne ont fait le voyage immédiatement jusqu’à Genève le lendemain de mon accouchement et ont été présents dans ma vie depuis ce jour là. Mon mari venait à l’hôpital plusieurs fois par jour et ne cessait de me répéter je considère que j’ai 2 filles. Cela me faisait tellement mal que je souhaitai qu’il ne vienne plus me voir à l’hôpital, mais jamais je ne l’ai en aucun cas bousculé ou obligé à le porter ou autre. Un matin je suis entré à la pouponnière et je l’ai trouvé entrain de baigner le petit tout fier sous sa blouse blanche avec cet être fragile dans ses grands bras et j’ai compris que Bryan allait savoir mieux faire avec son père que quiconque d’autre.
A mon retour à la maison (le 24 décembre) je me suis rendue compte que notre vie de famille allait être bouleversée, en bien ou en moins bien? je ne le savais pas encore (maintenant non plus d’ailleurs) mais le fait est qu’elle était bouleversée. Mon mari a fait une depression qui a duré 8 mois. Il a perdu goût à la vie et n’avait plus confiance en lui. Il était excellent vendeur (assurance) il ne savait plus regarder les gens en face de peur d’être jugé. Nous voilà deux ans plus tard, dans un autre pays (nous avons quitté la France pour venir en Suisse) afin que Bryan puisse être suivi au mieux, dans une autre maison, entourés d’autres personnes, avec mon mari qui s’est mis à son compte et s’est lancé de nouveaux défis dans la vente de bien immobiliers et financiers. Il excelle et tout cela je suis sûre c’est Bryan qui l’a aidé à le réaliser, pour lui prouver qu’il nous porte bonheur quelque part et à nous de savoir le lui rendre. Nous avons cependant toujours le même rêve: que notre enfant puisse évoluer et s’épanouir comme ses soeurs dans un monde où nous sommes tous différents les uns des autres, mais acceptés les uns par les autres avec nos différences. En résumé, mes amis, ma famille et tout le monde qui m’a entouré m’a aidé à surmonter ma douleur et mes angoisses. Mes soeurs, mes frères, toute ma belle famille étaient tous là pour nous et avec nous. Nombreux sonr ceux qui ont tout de suite demandé à être parrain et marraine de Bryan, finalement j’ai choisi 2 parrains (mon frère et un ami intime, et ma soeur). En somme, mon état d’âme d’antan et celui de maintenant est le suivant: 1/ La culpabilité:
Au début oui, plus maintenant. Aucune raison d’être coupable. Je n’ai pas fauté en donnant vie à un être capable de donner tant d’amour et de sincérité. 2/ La douleur:
OUI, au début ça me faisat mal de ne pas savoir ce qui m’attendait, maintenant ça me fait mal de ne pas savoir ce qui l’attend!! 3/ Seule:
OUI, encore maintenant malgré tous les gens qui m’entourent, surtout quand je me pose des tas de questions, mais j’ai commencé une psychothérapie car c’est moi maintenant qui déprime mais ce n’est pas à cause de Bryan mais du fait de tous les changements que j’ai vécu durant ces 2 dernières années et le fait de devoir rester forte devant mes enfants et face à la déprime de mon mari. 4/ Peur:
Peur de l’avenir de mes 2 filles face à l’handicap de leur frère. Peur pour ma fille aînée qui a dû subir pas mal de changements depuis la naissance des jumeaux et qui a vite été absorbée par l’handicap de son frère. peur pour la jumelle de Bryan afin qu’elle ne culpabilise pas et qu’elle se sente obligée d’assumer son jumeua du fait qu’il n’ait pas eu la chance qu’elle a eu. Peur de mourrir trop tôt et de ne pouvoir faire tout ce que je dois faire afin que Bryan soit le plus autonome possible car même si mon mari a accusé le coup de Bryan maintenant, je suis certaine qu’il est incapable d’achever le travail que j’ai commencé (non par manque de volonté mais de peur de ne pas être à la hauteur il abandonnera avant de commencer!!) 5/ Heureuse et comblée:
OUI, d’avoir eu à la fois la malchance et la chance d’avoir mes 3 enfants et surtout mon fils! J’ai appris à souffrir mais aussi à apprécier chaque minute de cette vie et ce qu’elle apporte. Avec mes filles je suis comblée mais avec mon fils je suis gâtée par son amour et sa façon de donner sans rien demander en retour!! Voilà mon long témoignage et mon vécu que je partage avec une autre personne que moi pour la première fois depuis que mes enfants sont nés. Grand merci à tout ceux qui m’ont aidé à en arriver là et surtout à mon petit ange sans lequel je serai vide aujourd’hui!!
Nadia