Catherine, maman de Barbara née en 1999
Bonjour, Je suis la maman de Barbara, née en août 1999. Lorsque nous avons décidé, mon mari et moi, d’avoir un enfant, noter voux a été exaucé immédiatement. Nous avons fait le test des marqueurs sériques sans y attacher d’importance, car ce genre de chose n’arrive qu’aux autres ! Lorsque mon gynécologue m’a appelé pour me dire que le test était positif, je me suis sentie désespérée. Nous avons parlé toute la soirée avec mon mari et avons décidé de ne pas faire d’amniocentèse, car nous n’avions pas l’ intention d’avorter, quoi qu’il en soit. D’autant plus que très souvent, le fait que ce test soit positif ne veut rien dire. Nous avons donc décidé de ne pas trop nous inquiéter et nous y sommes facilement arrivés. A la fin du 6e mois de grossesse, lors d’une visite chez ma gynécologue, j’ai eu une hémorragie et j’ai donc couru à l’hôpital. Là, ils m’ont vite rassurée, en me disant que ce n’était rien de grave. Par contre, j’avais trop de liquide amniotique, provoqué par une malformation du bébé au niveau du duodénum. 2 jours plus tard, ils m’ont amené dans un autre hôpital pour passer une échographie plus approfondie et là, sans aucun tact, on nous a annoncé qu’il y avait des chances que notre fille soit trisomique (atrésie duodénale + fémur légèrement plus court + épaississement de la nuque), mais que les signes n’étaient pas suffisamment évidents pour le savoir avec précision. On m’a donc mis au repos, car le risque le plus élevé était d’accoucher avant terme. On m’a fait des piqûres pour faire mûrir les poumons du bébé. Je suis rentrée chez moi 5 jours plus tard et je devais me rendre à l’hôpital une fois par semaine pour un contrôle. Cela a duré un mois, pendant lesquels je passais de l’espoir à l’angoisse la plus totale. J’avais peur d’accoucher d’un monstre. Le plus terrible était ma peur de l’accouchement. Pas en lui-même, mais de savoir arrivé le moment du verdict et de ne pas être à la hauteur, de lire dans le regard de la sage-femme que oui, elle était trisomique. Le 3 août 1999, j’avais rendez-vous à l’hôpital pour mon contrôle. Je me sentais en forme depuis quelques jours et on plaisantait avec mon mari sur le fait qu’à la fin, au lieu de naître prématurément, notre fille allait peut-être se faire attendre, car tous les contrôles précédents avaient été très encourageants. Avant de monter dans le service, je me suis rendue aux toilettes où j’ai perdu les eaux ! On m’a donc immédiatement alitée avec interdiction formelle de bouger, pour ne pas risquer une rupture du placenta à cause de la quantité de liquide amniotique. Les contractions ont duré environ 3 heures, pendant lesquelles toutes mes angoisses ont miraculeusement disparu. Nous étions heureux, bien qu’inquiets du fait que je n’en étais qu’à la 34e semaine, de savoir que notre fille allait naître. L’accouchement s’est tellement bien passé que je voulais déjà faire le 2e alors que j’étais encore sur la table ! Conscients des problèmes que risquait d’avoir Barbara, les médecins et la sage-femme me l’ont uniquement laissé entrevoir avant de l’emporter pour les premiers contrôles. Je me souviendrais toujours de ses yeux noirs, grands ouverts, qui me fixaient et de tous ses cheveux, noirs également. L’amour à première vue ! La sage-femme, avec qui j’avais lié amitié, et les médecins nous ont tout de suite dit que selon eux elle n’était pas trisomique, mais qu’ils voulaient quand même lui faire un caryotype. Pour moi, plus rien n’avait d’importance. c’était le plus beau jour de ma vie et j’étais heureuse. Barbara ne pesait que 1,5 kg., mais elle était en forme, à tel point qu’elle a été transférée dans un autre hôpital le lendemain pour être opérée d’atrésie duodénale. C’est là que 13 jours plus tard, le chirurgien nous a confirmé qu’elle était trisomique. Nous nous y attendions, mais ça a quand même été un choc. Barbara est restée 5 semaines à l’hôpital, dont 3 en couveuse. Nous allions la voir tous les jours, et c’était chaque fois de grands moments de bonheur. la 1ère fois où nous l’avons pris dans nos bras, son premier biberon. Mes angoisses disparaissaient comme par miracle chaque fois que j’étais avec mon bébé. Plus rien ne comptait et je trouvais la force d’espérer. Mes parents ne savaient rien des doutes de trisomie. Ils étaient déjà suffisamment inquiets pour le reste. J’ai préféré attendre qu’ils la voient, la prennent dans leurs bras et restent quelques heures avec elle avant de le leur annoncer. Bien sûr, ils se sont effondrés, m’en ont un peu voulu de le leur avoir caché, mais je sais que j’ai fait le bon choix, car ils ont vu en elle l’enfant merveilleux qu’elle est avant d’y voir l’enfant trisomique. Barbara a maintenant 18 mois (demain). Elle ne marche pas encore, mais elle commence à se lever seule, elle se déplace en rampant, elle adore être dans l’eau et égaye la maison avec ses da-da-da, la-la-la. Elle a été intégrée à la crèche à temps plein depuis ses 13 mois, afin qu’elle puisse socialiser avec les autres enfants. Tout ce passe à merveille, mais nous avons maintenant décidé de la garder à la maison jusqu’au printemps, car elle est trop souvent malade. Je voudrais terminer en vous disant que chaque fois que je regarde ma fille, je remercie le ciel de ne pas avoir pris en considération, ne serait-ce qu’une seule seconde, l’hypothèse de l’avortement. C’est difficile, mais ça en vaut la peine. Je ne sais pas, par contre, si j’aurais la force de le refaire. Je ne crois pas. Ce qui me fait le plus de mal c’est, comme quelqu’un d’autre l’a dit dans son témoignage, que la société voit dans ses enfants des accidents et fait tout pour qu’ils ne viennent pas au monde. Je ne suis pas croyante, mais je crois dans le destin et je crois que si mon enfant est trisomique, c’est parce que cela fait partie du bout de chemin que je dois parcourir sur terre.
Catherine